AUTEURS-PERSONNAGES
Heidegger et le bricolage
Préface
COLLECTION DES NOUVEAUTÉS
HEIDEGGER ET LE BRICOLAGE
PRÉFACE


Il arrive à la Philosophie, comme à l’Histoire, de bégayer. Socrate n’a laissé aucun écrit, sa pensée nous est parvenue à travers les textes de Platon et Xénophon. Botul est le philosophe de l’oralité du XXe siècle, mais il est également – on le sait – celui de l’auto-texture du logos, c’est-à-dire d’une écriture ne s’adressant qu’à lui-même, dans un processus constructif de réflexion schizo-philosophique. Or, la pensée de Botul plane sans se poser dans l’oeuvre de son disciple inavoué Heidegger. Le bégaiement de la Philosophie transforme, par le truchement de la dialectique élastique, un parallélisme en perpendicularisme. Autant Platon et Xénophon avaient revendiqué l’influence de leur maître commun, autant Heidegger s’est employé à dissimule celle de Botul. Les écrits de Heidegger n’exposent en rien la philosophie de Botul. Heidegger a en effet élaboré un style d’écriture philosophique
spécifiquement destiné à masquer au lecteur l’influence de Botul sur sa propre pensée. En lisant Heidegger, on ne peut pas appréhender Botul, surtout si on croit comprendre quelque chose. Il semble en revanche difficile de saisir les implications et les enjeux de la pensée heideggerienne sans avoir fréquenté la philosophie botulienne.

La dépendance de Heidegger à Botul se manifeste dans l’emploi ressassé du processus mécanique de dévoilement : Heidegger se percevait comme une roue de vélo voilée que Botul aura su dévoiler.

En -390, la technique des douelles cerclées n’était maîtrisée que par quelques tonneliers gaulois. Les bons tonneaux étaient rares et
chers(1), beaucoup de tonneaux bon marché présentaient des brèches. Ce constat historique permet de comprendre que le récit de Platon dans le Gorgias évoquant L’homme aux tonneaux pleins, l’homme aux tonneaux percés(2) n’était, de toute évidence, qu’un placement de produit pour un tonnelier gaulois.

De son côté, Heidegger a grandi parmi des tonneaux parfaitement
étanches. Les tonneaux fissurés avaient disparu du marché allemand. Il eut été superfétatif(3) pour Martin de faire de la publicité pour la tonnellerie familiale. Le développement de la technique restreignait ainsi son champ philosophique. Sans l’influence déterminante de Botul, celui qui allait devenir Le Philosophe allemand du XXe siècle serait probablement resté un charpentier de tonneau.

Les précieux conseils de Jean-Baptiste lui ont permis de s’affirmer
comme le Philosophe du Bricolage, maître à penser des grandes enseignes. Son manifeste Sein und Zeit pose les bases de l’outillage moderne (outil à-portée-de-la-main). La question de la Technique révèle aux développeurs de l’électro-portatif la voie de la maniabilité (Ge-stell)(4). Pas une visseuse-dévisseuse n’échappe aux règles suggérées par Botul et pillées par Heidegger(5).

Les adeptes de Heidegger s’évertuent à dissocier le nazi du philosophe. Cette maïeutique schizophrénique n’est pas sans fondement, elle met en évidence l’influence de Botul. La puissance tropistique de la pensée botulienne a permis à l’oeuvre de Heidegger de ne pas se vautrer dans la fascination nationale-socialiste ambiante.

Il aura fallu un travail de recherche historique à la fois complexe et méticuleux pour révéler le rôle de Botul dans la genèse et l’épanouissement de la pensée heideggerienne.

Nous espérons que la publication de ce travail de longue haleine mettra enfin un terme aux querelles qui opposent les exégètes de la pensée heideggerienne et les traducteurs de ses textes. Ces disputes ont contribué à l’élaboration de ce livre. Maintenant qu’il est achevé, ces ergotages stériles n’auront plus lieu d’être.

On ne peut pas se passer de la compétence des traducteurs, l’exemple suivant permet d’apprécier la différence entre une traduction humaine et une traduction automatique inintelligible.

Phrase originale de Heidegger : Damit ist nicht gemeint ein »Gegenüber«, ein Anschaubares und eine »Idee«, sondern das Herüberwinken und das Hinubersichhalten im Offenen des Da-, das eben der lichtend-verbergende Wendungspunkt in dieser Kehre ist.(6))

Traduction officielle : Par là n’est pas visé quelque chose « en face », quelque chose d’intuitionnable, une « idée » ; mais bien ce qui du dehors vient – dans l’ouvert du là – faire envoi de signes et ce qui – dans l’ouvert du là – se tient tendu vers l’autre côté, le côté ouvert du là qui précisément se trouve être – en une allégie où du même coup il se met à couvert – un noeud de virages dans cette volte-face.

Traduction automatique internet : Ce qui s’ouvre dans la fondation de l’existence est l’événement. Il ne s’agit pas d’un « opposé », d’une « idée », mais d’un détournement et d’un repli à l’air libre, qui est précisément le point de retournement masquant la lumière de ce tournant.

Il est évident que la traduction automatique amphigourique n’aurait pas pu susciter l’engouement pour Heidegger provoqué par la traduction officielle.(7)

Jean-Baptiste Botul Heidegger et le bricolage Enquête doxographique et historique établie par Christian Béthune et Gérard Frugier.
Préface Bernhard-Baptiste Schäßner-Botul & Hilda-Ulrika Schäßner-Botul




























1. Comme les chameaux bon marché.

2. Gorgias, 493d-494b.




3. Pour des raisons d’élégance philosophique, nous préférons ce hapax à superfétatoire, car nous nous situons bien dans une pensée d’exception.



4. « Dans le Ge-stell se produit cette non-occultation, conformément à laquelle le travail de la technique moderne dévoile le réel comme fonds. » Martin Heidegger, La question de la Technique.
5. « La place est toujours le là-bas et le déterminés de la destination d’un outil, laquelle destination correspond à chaque fois au caractère d’outil de l’àportée-de-la-main, c’est-à-dire à l’appartenance à une totalité d’outils qui lui est assignée par sa tournure. » Martin Heidegger, Être et temps.







6. Martin Heidegger Beiträge zur Philosophie (Vom Ereignis) page 29, Vittorio Klostermann 1989.










7. Martin Heidegger, Apports à la philosophie. De l’avenance. Traduction de F. Fédier, Gallimard 2013.